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09/03/2021 Séminaire : La prévision saisonnière
Les saisons dans l’architecture et les jardins japonais
Evénement proposé pour le réseau par Anouchka Vasak
  • Date : 09/03/2021
  • Lieu : Laboratoire CERES, Ecole Normale Supérieure, 24, rue Lhomond 75005 Paris, 14h - 16h
Description complète :
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  • Lauriane Batté (ingénieure des Ponts et Chaussées, chercheuse en météorologie à Météo-France au CNRM/GMGEC), sur la prévision saisonnière (en visio-conférence)
  • Philippe Bonnin (architecte et anthropologue, directeur de recherche émérite au CNRS) : les saisons dans l’architecture et les jardins japonais


La séance aura lieu de 14h à 16h en visio-conférence avec le lien "gotomeeting"


Compte-rendu

Lauriane Batté (Météo France). La prévision saisonnière

Qu’appelle-t-on « prévision saisonnière » ? Ce n’est pas le fait de prévoir le cycle astronomique des saisons, même si le rayonnement solaire incident joue un rôle à prendre en compte. Ce ne sont pas non plus les proverbes ou dictons tels « Noël au balcon, Pâques aux tisons ». C’est anticiper entre 1 à 6 mois à l’avance les écarts par rapport à des normales climatologiques. On peut fournir une information sur les statistiques du climat en tenant compte :

  • des moyennes saisonnières dans des champs météorologiques (précipitations, températures…)
  • des modes de variabilité préférentiels
  • de la fréquence des événements (au sens probabiliste)

Pour prévoir les écarts, on recourt à des modèles statistiques et dynamiques (évolution de l’atmosphère, océans…). L’échelle de prévisibilité va du local au global en passant par l’échelle « méso ». La saison relève de l’échelle régionale à globale, l’échelle saisonnière est donc à la croisée de deux types de prévision. Les sources de prévisibilité majeures sont :

  • l’ENSO (oscillation australe : El Niño et Southern Oscillation) identifiée en 1969 par Bjerkness. C’est un phénomène de réchauffement au large du Pérou : tous les 2 à 7 ans les remontées d’eau froide s’affaiblissent. C’est la première source de variabilité saisonnière
  • la Niña : amplification des eaux froides à l’Est du Pacifique, d’où une augmentation de la convexion sur l’Atlantique. Le modèle ne marche pas partout, en particulier sous nos latitudes
  • « chez nous », domine la NAO (Oscillation Nord-atlantique). NAO + : amplification de l’anticyclone des Açores et dépression sur l’Islande, d’où des conditions plus froides dans les zones méditerranéennes et plus chaudes au Nord (Scandinavie). NAO - : conditions sèches et plus froides en Scandinavie, chaudes et humides sur le basson méditerranéen.
  • Autres sources de prévisibilité : les surfaces continentales (sensibilité à l’humidité du sol) et la cryosphère terrestre ainsi que la glace de mer.

Il y a également des phénomènes à plus courte échéance comme cette année la vague de froid de février, peut-être liée à un phénomène stratosphérique.

Application et utilité des prévisions saisonnières :

  • le Copernicus Climate Change en Europe
  • l’hydrologie
  • le secteur de l’énergie pour anticiper une demande en électricité par exemple
  • la gestion des risques : feux de forêts, santé…
  • l’organisation de chaînes logistiques

L’échelle intra-saisonnière (deux semaines à deux mois) est également primordiale pour la prise de décision.

Le réchauffement climatique intervient surtout au moment de l’initialisation du modèle, et quand on fait des évaluations de performance du modèle.



Philippe Bonnin (CNRS). Les saisons dans l’architecture et les jardins japonais.

Les Japonais ont l’habitude de dire qu’ils ont 4 saisons : haru (printemps), natsu (été), aki (automne), fuyu (hiver). Le problème est que cette affirmation est assez récente et vise à les faire entrer dans le concert des nations occidentales. Ils veulent se différencier des pays de mousson qui les entourent (2 saisons, une sèche et une humide). Il y a en fait 6 régions climatiques.

Il existait aussi un calendrier archaïque « naturel », fondé sur la succession de gestes à faire dans la culture. Ce calendrier réapparaît dans de nombreuses pratiques, car il donne une chronologie du travail agricole (ex : « Quand le coucou chante, sème le millet »). En outre, on a importé le calendrier chinois en 602 : l’année y est divisée en 24 souffles, et le pays est subdivisé en 72 climats. Mais le Japon n’est pas la Chine du Nord ! Ce calendrier est donc connu des lettrés sans qu’il corresponde vraiment à la culture japonaise.

On s’en tient aujourd’hui à 72 saisons, 8 registres, 6 régions climatiques. Parmi ces registres, il y a les dictons ou proverbes, et les pratiques : domestiques (faire sécher ou non son linge dehors…), agricoles jardinières, urbaines ; mais aussi les fêtes et rites sociaux, très partagés, les mots de saison dans la poésie (haïku notamment) ou encore les indices picturaux.

Par exemple pour le printemps, haru : purification du 4 février (la maison est purifiée avec des pois de soja lancés vers l’extérieur pour commencer le nouvel an – setsubun), la purification des corps (misogi), la semonce aux arbres fruitiers, le toshi-gi (grosse bûche de l’année), la floraison du prunier (ume), du cerisier, le front d’avancée de la floraison et du pollen, la fête du Hanami (on se réunit pour admirer les fleurs). A Kyoto, il y a de nombreuses fêtes liées à la saison : par exemple la fête du lancement du printemps, celle de l’inauguration des travaux agraires (Hata-iri), la floraison des glycines en mai, la procession pour conjurer la peste (16-17 juillet)…

Lors du koromogae (1er juin, été), on change beaucoup de choses : le futon, les couvertures, les vêtements, tapis, couvertures (le coton épais est remplacé par la soie) ; on ferme le kotatsu (chaufferette collective), on ouvre la maison, on est à l’affût du moindre courant d’air. Tous les jours quelque chose de nouveau arrive : saison des libellules, des lucioles, des grenouilles, de la poussée des bambous… Le 7 juillet c’est la fête de la canicule.

Les saisons donnent une leçon à la société, celle du recalage incessant.

Bibliographie :

  • Kervern Alain1992-94, Grand almanach poétique Japonais (I/ Matin de neige, II / Le réveil de la loutre), III / La tisserande et le bouvier, IV/ A l'ouest blanchit la lune, V/Le vent du nord), S.L.: éd. Folle Avoine
  • Malgré le Givre, essai sur la permanence du haïku », du même auteur, même édition, 1987
  • Sans doute introuvable : Kervern Alain (trad.), La lumière des bambous, 60 Haikai de Bashô et de son école. Slnd, éd. Folle Avoine.


 
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